Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/228

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maman Soulas, repartit simplement le jeune homme.

— Vous tuer ! répéta Thérèse étonnée. Vous vouliez vous tuer !

— Quand je vous ai embrassée hier au soir, je croyais bien que c’était pour la dernière fois. Mais comme je m’en allais mourir, Dieu m’a envoyé plus d’une raison de vivre.

Il se leva et découvrit le lit sur lequel il avait jeté la courte-pointe de soie pour garder le visage de Suavita contre les rayons du soleil.

Mme Soulas poussa un grand cri à la vue de l’enfant.

— Est-ce que vous la connaissez ? demanda Paul vivement.

— Moi ? répondit Thérèse comme si on l’eût accusée.

Puis elle ajouta :

— Non, sur ma conscience, Monsieur Paul, jamais je ne l’ai vue !

Il y eut un vague soupçon dans le regard du jeune homme : Thérèse aussi était absente, cette nuit.

Mais ce fut l’affaire d’un instant, et il dit :

— Vous êtes la meilleure femme que j’aie jamais rencontrée, maman Soulas.

Celle-ci avait les yeux fixés sur Suavita, dont maintenant le sommeil était paisible. Elle pensait :

— C’est elle ! je jurerais que c’est elle !

— Étaient-elles deux ? demanda-t-elle brusquement.

— Comment, deux ! fit Paul étonné.

— Quand vous l’avez sauvée ?

— Qui donc vous a dit que je l’avais sauvée, maman Soulas ? demanda Paul presque sévèrement.

Elle releva les yeux sur lui comme une personne qui s’éveille, et il vit deux grosses