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pelait la sainte femme ?

Quand elle eut monté les trois étages de l’escalier tournant, elle vit la porte de Paul Labre grande ouverte. Celui-ci la guettait et l’appela.

— Il y a eu bien du nouveau cette nuit, maman Soulas, lui dit-il. Je n’ai pas à me mêler de vos affaires, mais j’aurais donné un doigt de ma main pour vous avoir.

Thérèse lui répondit tout autrement qu’elle n’avait fait à M. Badoît.

— J’ai accompli une besogne dont je ne me repens pas, Monsieur Paul, dit-elle. Ça n’empêche pas que je suis bien fâchée de n’avoir pas été là, puisque vous avez eu besoin de moi.

Son regard se fixait sur la petite table où il y avait du pain, du vin, et un reste de fromage de Brie dans un lambeau de journal.

Paul était en train de manger.

— Ce n’est pas pour le déjeuner que j’ai eu besoin de vous, reprit-il. Quand la Renaud est venue pour faire votre ménage, je l’ai envoyée me chercher cela, car je ne pouvais pas sortir, maman Soulas. J’ai quelqu’un à garder ici.

Je ne sais pas pourquoi la pensée d’Ysole traversa l’esprit de Thérèse.

Ce ne fut pas frayeur qu’elle eut, mais bien espoir.

Expliquons-nous clairement et d’un mot : Mme Soulas, ayant à choisir entre deux malheurs, aurait mieux aimé trouver en sa fille une victime qu’un fléau.

Elle regarda Paul et dit, craignant d’interroger :

— Il y a quelque chose de changé en vous, Monsieur Labre. Ce matin, vous n’êtes plus le même homme.

— C’est que l’idée de me tuer m’a passé,