Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/210

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Paul ne prit pas même le temps d’appuyer sa main contre sa poitrine révoltée et dans laquelle il sentait un feu. Il frappa à grands coups de poing à la porte de Thérèse en criant :

— Madame Soulas ! ma bonne maman Soulas !

Mme Soulas était, en ce moment, sur la route de Saint-Germain, emportée par le trot cahotant de Marion, (poison !) qui n’avait pas de mine mais qui allongeait comme une reine.

Paul Labre frappa de nouveau et plus fort.

L’idée ne lui venait pas que Mme Soulas pût être hors de chez elle à cette heure.

Il s’étonnait de n’avoir point de réponse ; la bonne femme connaissait si bien sa voix. Après sa mère, c’était elle qui l’avait le mieux aimé.

Quand il comprit enfin que frapper était inutile, les bras lui tombèrent, et il fut saisi par une sorte de terreur.

— C’est maintenant qu’elle est morte ! pensa-t-il tout haut. Moi, je ne sais rien, je ne peux rien.

— Vous voulez donc la tuer, à la fin, maman Soulas ! s’écria-t-il avec un désespoir naïf, qui eût fait rire certaines gens, mais qui aurait mis des larmes dans les yeux de bien d’autres.

Toujours le même silence.

Paul prit sa propre clef et entra dans sa chambre.

Il n’avait plus de courage. Ce n’était pas en lui-même qu’il avait espéré.

Il déposa l’enfant sur son lit et alluma un flambeau. Il fut longtemps à faire cela. Ses mains maladroites lui refusaient service.