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naux.

Il ne faut jamais aller demander des comptes aux hommes habiles et sûrs qu’on a laissés là-bas.

Dans ce cas spécial on assassine volontiers aux colonies.

Antoine Labre ne revint pas de son voyage.

La pauvre baronne aimait son mari ; elle avait besoin de son mari ; on ne sait où peut aller une femme semblable, privée de guide et de soutien. Si elle se fût mise franchement sous la tutelle de Jean, son fils aîné, qui atteignait l’âge d’homme, tout aurait pu encore être sauvé ; mais, vis-à-vis de Jean, elle était jalouse de son autorité, à cause de Paul, son vrai, son seul amour.

Elles ont des raisonnements bizarres.

La baronne se dit que tant de malheurs devaient user la mauvaise chance. La veine allait être d’autant plus riche qu’on l’avait cruellement attendue.

La baronne vendit, pour jouer, d’abord, son indigent superflu, ensuite ce qui était pour elle et ses enfants le strict nécessaire.

Dieu eut pitié de Jean qui fut nommé élève consul et partit pour une lointaine résidence. Jean aimait son jeune frère Paul tendrement, malgré les maladroites préférences de leur mère. La meilleure part de ses appointements passa en France, dès qu’il eut acquis une petite position.

Cela servit à nourrir des ternes et à engraisser les martingales.

M. Lecoq, cependant, qui grandissait à mesure que tombait la misérable maison Labre, et qui, certes, ne pouvait tirer de la baronne aucun profit important, ne l’abandonnait point ; il lui restait fidèle et flattait complaisamment sa passion.