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Coyatier parvint jusqu’à dix pas de ces deux pavillons sans être inquiété. Cela ne lui donnait point une confiance exagérée.

Au contraire, il se disait :

— Ils sont en force puisqu’ils me laissent gagner. Va bien, tout de même ; pas moyen de reculer ; s’ils ne sont pas plus de trois en avant de moi, je fonce et je passe !

Sa main droite se crispait autour du manche de son couteau.

Mais ils étaient plus de trois.

Chopand, avec deux acolytes, sortit brusquement de l’ombre du pavillon Fumade. Comme le marchef inclinait vers la gauche, M. Mégaigne et un autre, brandissant leurs cannes plombées, sautèrent sur la voie.

En même temps, un groupe noir se montra dans l’axe de la rue Dauphine, marchant en bon ordre vers le pont.

— Bloqué ! dit Coyatier qui se rejeta en arrière. J’ai manœuvré comme un dindon, quoi ! j’en avais l’idée ! La petite demoiselle m’a rudement gêné, pauvre cœur !

Il fit volte-face, non plus déjà pour chercher une issue, car il savait ce qu’il avait sur ses talons, mais comme la bête fauve tourne et rôde avant de s’acculer.

La lune était sous les nuées, mais ses rayons tamisés faisaient la nuit claire.

Coyatier vit derrière lui un cordon immobile qui barrait toute l’étendue du pont, en largeur.

— Bloqué ! répéta-t-il. Je ne l’ai pas volé. Me voilà pris entre deux portes !

— Crébleu ! ajouta-t-il en jetant l’enfant sous son bras, sans précaution, cette fois, et