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d’intercéder auprès de votre femme défunte, comme je prie ma patronne, avec ce reste de foi que j’ai apporté du pays.

» Vous fûtes étonné, heureux, reconnaissant, quand la noble jeune fille dont vous sollicitiez la main vous dit un jour :

» — Comte, vous êtes père… Ceux qui m’aiment et qui me conseillent hésitent. Moi, je veux inaugurer mon bonheur par un bienfait. Qu’il n’y ait point de pleurs dans notre maison. La mère d’Ysole n’est plus ; je consens à légitimer Ysole par acte secret, annexé à notre contrat de mariage. »

— Vous savez cela !… balbutia le général.

— Voici ce qui s’était passé, reprit Thérèse :

» La veille, une femme s’était présentée à la demeure de votre fiancée, sous prétexte d’implorer une aumône. On pouvait toujours lui demander, comme il est permis à tous de prier les anges.

» Une fois introduite, au lieu de quêter la charité, l’étrangère raconta une pauvre histoire, — l’histoire de Madeleine. »

— C’était vous ? interrompit le général.

— C’était moi, et j’affirme que, dans cette entrevue, il ne fut rien dit qui pût diminuer l’affection — ni le respect qu’une femme doit à son mari.

« Elle était d’un monde où, en définitive, l’idée ne doit même pas naître qu’un homme comme vous doive épouser une fille comme Madeleine.

» Mais elle était saintement femme, et la dette contractée envers l’enfant lui apparut dans toute sa rigueur.

» Elle avait un cœur d’or, et le sacrifice de la mère la remua jusqu’au fond de l’âme.