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quette de la carriole, qui, à la vérité, était dure remarquablement.

— Hie ! Marion ! poison ! ordonna M. Flamant en songe.

Il dormait, Marion aussi.

« — Madeleine avait dix-huit ans, poursuivait Thérèse. Malgré sa coquetterie de fillette étourdie et vaine, je n’ai jamais rencontré de cœur plus candide que n’était le sien la veille du jour où vint ce beau régiment de lanciers.

» Le lendemain… Ah ! je vous l’ai dit : vous en savez des centaines de ces pauvres histoires ; le lendemain, Madeleine avait quelque chose à cacher à son père et au curé.

» On lui avait baisé les deux mains, là-bas, sous les châtaigniers.

» Elle n’aurait jamais cru qu’un homme pût être si beau ! ni murmurer de si douces paroles à l’oreille des jeunes filles.

» Celui-là était un officier. Il parla de Paris, de robes transparentes, de perles, d’amour, que sais-je ? Madeleine ne m’a jamais dit s’il prononça le mot mariage ; mais pour Madeleine, telle qu’elle était alors, il n’y avait point d’amour sans mariage.

» Avec ces pauvres enfants, pour tromper, on n’a même pas besoin de mentir.

» Ils restèrent trois jours, les lanciers. Pour Madeleine, c’était un fiancé qui partait. Il avait dit comme ils font tous : Je reviendrai.

» Et voyez la folie de ces pauvres filles ! Madeleine ne savait pas même le nom de son fiancé. Dans son cœur, elle l’appelait Charles. Que faut-il de plus pour pleurer ?

» Il ne revint pas. Est-ce qu’ils reviennent