me d’un ouvrier.
Il y eut une pause. Le général reprit avec un certain embarras.
— Il m’a semblé un instant que je vous avais vue autrefois quelque part ?
— Vous vous êtes trompé, répondit Thérèse avec un singulier accent.
— Pourtant, vous me connaissiez ?
— Une femme comme moi peut connaître un homme comme vous, sans être connue de lui.
Autre pause.
— Bonne dame, dit encore le général, j’avoue que je suis intrigué. Vous avez été envers moi compatissante, excellente, et pourtant, il semble qu’il y ait en vous contre moi je ne sais quelle amertume.
Thérèse eut un rire sec.
— N’allez-vous pas croire que j’ai de la rancune ? dit-elle.
— Si je vous avais fait du mal, sans le savoir…
Elle l’interrompit par un second éclat de rire.
— Vous avez deviné, murmura-t-elle. Un jour que vous passiez dans votre belle voiture, j’étais sur le trottoir, et vous m’avez éclaboussée. Il y a des taches qui restent.
— Je donnerais beaucoup pour voir votre visage au moment où vous me parlez ainsi, pensa tout haut le général.
Thérèse répondit :
— Vous l’avez vu. Je n’ai pas changé depuis tantôt.
— Avez-vous des enfants ? demanda le général.
— J’ai eu une fille, murmura Thérèse,