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don à papa.

Ils se regardèrent l’espace de deux ou trois secondes.

Le courroux du Père était déjà tombé.

Son visage d’ivoire jauni eut une expression cauteleuse qui passa, rapide comme l’éclair, pour faire place aussitôt à une placide indolence.

— Certes, dit-il, tu as de l’attachement pour moi, l’Amitié, et tout le monde ici m’entoure d’une filiale tendresse. Vous avez raison, mes pauvres enfants, et c’est moi qui ai tort. On ne peut pas être et avoir été ; ce sera ma dernière affaire. Comment voulez-vous que le général lise ce nom de Gautron et voie qu’il est tracé à la craie jaune, puisqu’il fait nuit sur le carré ? C’est révoltant d’absurdité ! Idiot ! idiot ! Je me fais honte ! À bas le vieux fou !

Il eut un rire plus contempteur que celui de Lecoq lui-même.

— Mais que voulez-vous ? reprit-il rondement : l’Amitié l’a dit : la chose réussira tout de même. Tout m’a toujours réussi, malgré mon défaut de capacité…

— Papa ! fit Lecoq, en le menaçant du doigt, vous avez de la rancune.

— Viens m’embrasser, toi ! s’écria le bonhomme qui essuya ses yeux secs. Ingrat ! tu ne sauras jamais comme on t’aime !

Il y eut une accolade attendrie.

— On a demandé, reprit le Père, qui était ce Gautron ? Nous avions laissé ce pauvre brave Coyatier, le marchef, en prison pour payer la loi. Il en sait plus long que je ne croyais. Il m’a fait dire par un ami commun qu’il raconterait, au bon moment, une demi-douzaine de nos petites histoires, si je ne