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Il lisait, sans lunettes, d’une voix faible et placide, un cahier ouvert devant lui et chargé de cette écriture large, ronde, évasée qui fait connaître les actes et contrats du dernier siècle.

Le cahier, cependant, ne datait pas de si loin. C’était la main de l’écrivain qui avait cent ans.

Les autres assistants écoutaient.

— Mes enfants, dit le vieillard, interrompant sa lecture au moment où il achevait le préambule de son acte, je vous prie de m’accorder une scrupuleuse attention. Les affaires sont les affaires. Je suis fâché que l’héritier de l’infortuné fils de Louis XVI ne soit point ici, car il s’agit spécialement de ses intérêts, et le présent travail lui est dû en grande partie.

Avant que ces mots : « fils de Louis XVI » eussent été prononcés, un étranger, introduit par hasard dans ce pacifique conciliabule, aurait cru assister à une séance commerciale ou industrielle. Cela ressemblait à quelque conseil d’administration où cette belle personne du canapé se fût égarée pour un motif quelconque.

J’ai vu des dames faire l’ornement de plus d’une assemblée générale.

Après que ces mots « fils de Louis XVI » eurent été prononcés, l’intrus, changeant d’avis, aurait, certes, eu l’idée d’une de ces dévotes conspirations, organisées dans quelque trou, par des bourgeois moisis et des gentilshommes archi-myopes, en faveur d’un faux prophète quelconque, Naundorf, Richemond, Pimprenelle ou Patouillet.

Les Louis XVII abondaient ; l’un d’eux pouvait bien avoir un héritier.

Et ici, la physionomie du vieillard prési-