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réunis au dernier étage de la tour Tardieu, dans la chambre no 9.

C’était la pièce située immédiatement au-dessus de celle où la plus jeune des filles du général languissait sur sa chaise longue. Comme le jour baissait déjà et que les persiennes closes interceptaient la lumière, on avait allumé deux lampes qui, coiffées de leurs abat-jour verts, répandaient dans l’appartement de parcimonieuses clartés.

Il y avait en fait de meubles un canapé, recouvert de drap brun, des fauteuils et des chaises de même nuance, le tout forme Empire, une grande pendule d’albâtre, à colonnes, sur la cheminée, une table carrée, avec tapis de drap, pareillement brun, et une vaste armoire à coins de cuivre.

Sur la table, quelques papiers étaient épars, avec tout ce qu’il faut pour écrire.

Au centre de la table un vieillard était assis dans un fauteuil de bureau à dos circulaire et en cuir.

De l’autre côté de la table, quatre messieurs d’apparence bourgeoise et cossue occupaient également des fauteuils. Sur le canapé une femme jeune encore, très élégante et remarquablement belle, prenait place à côté d’un homme à robuste carrure, dont le visage énergique exprimait une singulière intelligence.

Le vieillard avait atteint les dernières limites de l’âge, on lui aurait donné cent ans. À dix pas, il faisait l’effet d’un ivoire antique.

C’était une figure calme et froide, immobile jusqu’à faire naître l’idée de la pétrification.

Ses traits avaient dû être beaux, mais l’aspect vitreux de ses prunelles faisait peur.