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LE CHATEAU DE MONTRATH.

ce pays me fait peur !… Depuis que je suis en Irlande, les paroles de cette femme me poursuivent sans cesse… À Londres, je me riais d’elle ; mais ici, Seigneur, qui donc viendrait à mon secours ?

Son corps frêle, et dont les proportions offraient le type accompli de l’élégance mondaine, eut un léger frémissement ; sa joue devint plus pâle.

— Je crois bien que milord m’aime, reprit-elle ; j’ai trouvé en lui, jusqu’à présent, un mari indulgent et affectueux… Mais cette femme !… chaque jour elle était sur mon passage… ses mystérieuses menaces me reviennent en mémoire… Je cherche un sens à ses paroles ambiguës, et toujours je crois deviner un crime.

Elle s’interrompit, tremblante ; des pas sonnaient sur le carreau du corridor qui conduisait à sa porte ; elle tressaillit, comme font les enfants au moindre bruit qui s’entend dans les ténèbres.

La porte s’ouvrit, et la charmante figure de miss Francès Roberts parut sur le seuil.

Lady Montrath poussa un cri de joie et s’élança vers elle, les bras tendus. Il n’y avait plus sur ses traits ni crainte ni tristesse. Elle embrassa Francès avec une affection de sœur, et