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LES SAXONS.

avait une expression de glaciale humilité, sous laquelle perçait la raillerie. D’autres fois je voyais ses joues s’empourprer, son regard s’alourdir et sa démarche chanceler.

« Une odeur de liqueurs fortes emplissait la chambre à son approche.

« — Que désire milady ? me dit-elle avec son respect ironique et froid.

« — Que veut-on faire de moi ? demandai-je.

« — Milord est mieux, répliqua l’Anglaise ; demain matin, je pense, il pourra vous dire ce qu’il compte faire de vous.

« Quand cette femme fut sortie, je me jetai à genoux sur le tapis et je mis ma face contre terre.
 

« C’était vous, Morris !… tout en bas, tout en bas de la colline, un carrick irlandais ! Oh ! Comme mon cœur tressaillit ! Je vous reconnus ; il ne me fallut pour cela qu’un coup d’œil !

« Morris, mon noble Morris, mon fiancé ! mon âme s’élança vers vous ; mes bras s’étendirent et je vous appelai…

« Oh ! je vous appelai jusqu’à perdre la voix et le souffle ! Vous ne m’entendiez pas ; vous alliez le long des sentiers de la colline, regardant toujours la maison de lord George et ne