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DEUXIÈME PARTIE

en chancelant les amis de milord ; j’entendis quelque temps encore leurs chansons et leurs rires…

« Puis ce fut le silence.

« Que sont-elles devenues ? Elles étaient belles, jeunes, heureuses, on les aimait ; bien des larmes ont dû couler sur elles !

« Que sont-elles devenues ?

« On dit que ces pauvres filles, enlevées par les hommes puissants, servent de jouet un jour, puis sont repoussées avec dédain après l’heure du plaisir. Elles tombent alors tout au fond de la misère de Londres, qui n’est pas comme notre misère à nous, Morris, parce qu’à la souffrance elle mêle l’infamie !

« Dieu aura pitié peut-être de ces pauvres victimes…

« Des valets vinrent dans le salon où nous restions seuls, milord et moi.

« Milord eut grand’peine à se lever ; ses serviteurs soutinrent ses pas tremblants et le conduisirent jusqu’à la chambre où il avait coutume de reposer. On me saisit à bras-le-corps malgré ma résistance, et l’on me porta jusqu’à cette même chambre.

« Puis on ferma sur nous la porte à double tour.