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DEUXIÈME PARTIE

Et Mickey Mac-Diarmid dit tout bas :

— Oh ! frère ! pardonnez-moi !… il y a des heures où mon esprit borné ne sait point comprendre votre noble tâche !…

Le silence continuait dans la nuit des voûtes. Chez cette foule versatile et si changeante, l’impression du moment était profonde et grave.

Il semblait qu’une parcelle de la grande âme de Morris eût passé dans chaque poitrine.

Et quand la bouche du chef se rouvrit de nouveau pour prononcer un appel de guerre, ce fut une enthousiaste clameur, clameur contre l’Angleterre, contre le protestantisme et contre O’Connell lui-même.

L’influence du Libérateur absent cédait devant la parole de Morris. On ne se souvenait plus que des dures menaces proférées par lui en toute occasion contre les ribbonmen ; on l’accusait de manquer de cœur. Comme il n’est pas donné à ce peuple irlandais de garder en rien une juste mesure, on raillait cruellement l’idole de la veille ; on l’appelait avocat bavard, suppôt de chicane, procureur avide, et on l’accusait d’acheter des maisons avec la rente du Repeal.

Puis l’on s’attendrissait.

— Oui, oui, Morris, mon chéri ! disaient quelques-uns en pleurant, vous nous trouverez