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DEUXIÈME PARTIE

— Voilà une bonne femme de Knockderry, se disaient les Molly-Maguires, qui vient pour avoir sa part de la danse. Il n’est pas trop tard !

— Hardi, ma belle ! cria la grosse voix du géant Mahony ; au train que vous menez, il vous en restera encore un petit peu.

Et Pat et Mac-Duff et les autres répétèrent en chœur :

— Hardi, ma belle ! poussez, holà ! poussez !

La mante ronge semblait n’avoir pas besoin de ces encouragements ; les naseaux de ses petits poneys soufflaient une fumée épaisse.

Elle dévorait l’espace…

On ne voyait plus que le torse des malheureux dragons qui n’avaient pu s’accrocher aux troncs d’arbres ; cette mort lente, qui venait par degrés et qu’on ne pouvait point combattre, les affolait ; ils agitaient leurs bras dans le vide en poussant des cris insensés.

Quelques-uns, saisis de vertige, s’élançaient à corps perdu dans la fange, et cherchaient à gagner la chaussée à la nage.

Mais la fange les recevait, flasque, inerte, et les engloutissait lentement.

À chaque homme qui disparaissait ainsi, c’étaient derrière les buissons de frénétiques hourras.