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DEUXIÈME PARTIE

Peut-être était-ce la pensée d’Ellen qui venait de visiter son cœur ; peut-être était-ce le dernier adieu prononcé du fond de l’âme à l’heure suprême…

Cela dura un instant, puis les regards du major se tournèrent de nouveau vers sa petite armée à l’agonie. Son front redevint pâle.

Sur ce visage dont la beauté dominait, héroïque, la scène de désolation, les regards de Jermyn restaient invinciblement attachés. Jermyn souffrait presque autant que les soldats à l’agonie. Tout ce qu’il y avait en lui de généreux et de noble se révoltait : sa conscience bourrelée était à la torture.

Et que de haine pourtant parmi ces remords ! Comme il épiait, attentif, une marque de frayeur ou de faiblesse ! Comme il attendait avec d’ardentes impatiences un soupir, un cri, une plainte !…

Rien. Une statue de marbre en face du marteau qui va la briser.

Jermyn haïssait, mais il admirait. Il eût donné sa vie pour la mort de cet homme.

Il se sentait vaincu, même au moment de tuer. Son âme bouleversée jalousait les minutes de calme que son rival allait vivre encore.

Et il songeait à le sauver pour redevenir un