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LES SAXONS.

Le major avait produit sur elle l’effet d’un héros de roman. C’était la figure principale qui manquait jusqu’alors au drame de son voyage.

Elle se mit à penser au major. Elle lui donna généreusement toutes les qualités romanesques des beaux guerriers qui foisonnaient dans sa mémoire.

Aucun de ses romanciers favoris n’avait jamais rien créé d’aussi parfait.

Ses rêveries devinrent d’une suavité inquiétante, et la pauvre Francès fut obligée de subir des tirades inouïes sur la puissance irrésistible de l’amour.

À vrai dire, Francès écoutait moins que jamais. Elle aussi avait rapporté des Mamturcks un sujet de rêverie, et bien souvent, soit qu’elle fût seule, soit que la parole vide de sa tante bourdonnât à son oreille, l’esprit de la jeune fille s’échappait vers ces sites sauvages où elle avait vu le bras d’un homme contenir une foule furieuse.

Un homme seul, un jeune homme, aussi beau que brave, et dont le visage fier s’animait tout au fond des souvenirs de Francès.

Un regard orgueilleux et doux à la fois, un front puissant, une parole éclatante et rapide comme la foudre.

Elle savait son nom ; car tandis que mille bras