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PREMIÈRE PARTIE.

Elle avait un petit air de dignité sévère qui contrastait singulièrement avec les airs langoureux de Fenella Daws. On eût dit vraiment que la tante et la nièce avaient changé de rôle, ou que la jolie fille, par une muette moquerie, mettait sur son gracieux visage le masque qui convenait à la vieille femme.

Cette austérité n’avait, au reste, nul rapport avec la timidité de nos vierges. La modestie change d’allures en passant le détroit, et les belles filles d’Albion n’entendent point comme nous la pudeur.

Peut-être l’entendent-elles comme il faut.

Le regard de Francès, ferme et hardi, ne se baissait point à tout propos. Le rose délicat de sa joue ne passait point au pourpre de minute en minute. Elle était calme et à son aise comme un homme.

Et cette assurance donnait à sa physionomie ce qu’il faut à la femme de fierté douce. Il y avait autour d’elle comme un reflet attrayant de digne sérénité.

Dans la manière dont la traitait sa tante, on aurait pu reconnaitre un singulier mélange de déférence étudiée et de dédain très-franc. Fenella ne pouvait voir en effet dans cette petite fille qu’une créature évidemment inférieure ;