Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 1.djvu/47

Cette page a été validée par deux contributeurs.
39
LES MOLLY-MAGUIRES.

tionnaire, le bruit s’approchait rapidement ; en se rapprochant, il se divisait ; de telle sorte qu’au bout de deux ou trois minutes Morris entendit les avirons battre l’eau derrière lui, à sa droite et à sa gauche.

Il ne voyait rien. Les barques mystérieuses devaient être bien près de la sienne, mais le brouillard épaississait autour de lui son impénétrable voile.

Quels que fussent ces nocturnes passagers qui traversaient le lac à cette heure, Morris Mac-Diarmid n’était pas homme à s’arrêter pour si peu ; il enfonça ses rames dans l’eau, et reprit sa route silencieuse.

Si bien habitué qu’il fût à la traversée du lac Corrib, l’épaisseur du brouillard le trompa plus d’une fois en chemin, et plus d’une fois une île, aperçue à propos au moment où il allait égarer sa route, le fit virer de bord.

Il y avait une chose étrange : chaque fois que Morris tournait ainsi l’avant de sa barque à droite ou à gauche, il entendait toujours à quelques brasses de lui cet inexplicable bruit de rames…

On eût dit que tous les bateaux du village dansaient cette nuit-là sur le lac.

Morris croyait presque rêver. Il avait vogué