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PREMIÈRE PARTIE.

tout en augmentant singulièrement son importance.

Au su de tout le monde, sa besogne consistait à garder et à nourrir un animal féroce (un loup, disaient les uns ; un tigre, disaient les autres) qui faisait sa demeure dans l’un des donjons du château.

La vertu du pauvre Pat n’était point la discrétion ; fier de ses bons habits et de sa position nouvelle, il s’en était vanté à qui avait voulu l’entendre. Chacun savait désormais que Pat, trois fois dans la journée, jetait la pâture au monstre, et recevait pour cela un salaire qui eût rendu jaloux le plus actif travailleur du comté.

Et pourtant Pat, le pauvre bon garçon, ne faisait œuvre de ses dix doigts !

Il s’était arrangé un logement commode au rez-de-chaussée d’une des tours de Diarmid. Les ruines, admirablement conservées, offraient encore un suffisant abri contre les intempéries du ciel.

Assurément, Pat en sa vie n’avait jamais été de moitié aussi bien logé.

Les Irlandais affiliés aux sociétés secrètes n’aiment point à voir les haillons de l’un d’eux se changer en un habit sans trous. Ce n’est pas précisément jalousie ou méchant vouloir ; c’est