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PROLOGUE.

chansons à Pat, mais Pat avait mal chanté.

On avait énuméré les plus beaux coups de bâton donnés et reçus dans le mois ; on avait parlé des derniers meetings ; on avait même bu à la santé du Libérateur : il ne restait plus rien à faire.

— Père, dit Morris en un moment de silence, je sais ce qui vous rend triste… C’était hier que nous devions avoir des nouvelles… mais il y a eu tempête en mer ces jours-ci : nous aurons des nouvelles demain.

Le vieux Mill’s jeta un regard furtif vers la chaise vide qui était à côté de lui.

Puis ses yeux se baissèrent.

— Dieu le veuille ! murmura-t-il ; vous avez peut-être bien agi, enfants… l’honneur de notre Jessy est sauvé… Mais n’avez-vous pas suspendu un malheur au-dessus de sa tête ?

Il y eut un instant de silence.

Une émotion profonde, combattue par la vigueur d’une volonté de fer, était sur le visage de Morris.

— Il le fallait ! prononça-t-il tout bas.

Le siége qui restait vide à la gauche du vieillard appartenait à Jessy. Jessy O’Brien était la fille orpheline de la sœur de Mill’s, qui l’aimait comme une enfant chérie. Les huit frères