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PREMIÈRE PARTIE.

Morris revint à pied en Irlande.

Depuis ce jour, tous les mois, Jessy écrivait à son père d’adoption.

Elle ne se plaignait point et le nom de Morris n’était jamais prononcé dans ses lettres ; mais elle semblait bien triste.

Une fois, le mois s’écoula et la missive accoutumée ne vint point.

Un autre mois se passa, et, sur ces entrefaites, un malheur vint frapper la maison de Diarmid. Le vieux Mill’s, accusé de whiteboysme, fut mis en prison comme ayant contribué à l’incendie de la ferme de Luke Neale.

Une fois le chef de la famille absent, ses fils se jetèrent avec une violence accrue dans la guerre nocturne des ribbonmen.

Morris avait cherché dans une autre passion un refuge contre les souffrances de son amour. Il s’était imposé une tâche immense et s’était donné tout entier au salut de l’Irlande.

Son patriotisme ardent et aveuglé peut-être lui avait montré une voie ouverte. Cette voie ardue et périlleuse, il s’y était jeté avec toute la fougue intrépide de sa nature ; il en avait vu bien vite les dangers, et soupçonnait au bout un précipice infranchissable. Mais il ne voulait point reculer.