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PREMIÈRE PARTIE.

pas plus peur aujourd’hui que ce soir de l’année dernière où il y avait dix couteaux dégainés autour de sa poitrine nue… On le tuera, c’est sûr, mon fils, mais on ne lui fera pas peur !

Jermyn passa une de ses mains sur son front.

— C’est un cœur brave et fort, pensa-t-il tout haut.

— Je ne sais pas, je ne sais pas, dit le géant. On prétend qu’il a le diable à son service. Moi, je crois plutôt qu’il sait tout bonnement jeter des sorts… Parlons raison, Mac-Diarmid. Comment expliquer autrement la conduite de Morris, votre frère ?

Jermyn ne répondit pas.

— Voilà trois fois, reprit Mahony, que Morris se mêle de ses affaires… Sans Morris, on peut bien dire cela devant vous, le major aurait déjà porté chez Satan sa face pâle et ses yeux immobiles… Il faut que Morris ait été ensorcelé.

Jermyn garda encore le silence, et le géant reprit en secouant les cendres de sa pipe :

— Voyez-vous bien, mon petit bijou, il y a quelque chose qui ne va pas droit dans la maison de Mac-Diarmid… Le vieux père est partisan d’O’Connell et nous traite de brigands : je n’y vois point de mal… d’ailleurs c’est un saint