Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 1.djvu/122

Cette page a été validée par deux contributeurs.
114
PREMIÈRE PARTIE.

Celui-ci essayait de percer la foule en silence, mais la cordialité des hôtes du cabaret se montrait presque aussi menaçante que la colère des gentlemen du parloir.

Chacun voulait serrer la main du major et toucher son uniforme ; de tous côtés on élevait des verres autour de lui, et l’on criait :

— Buvez, Percy, buvez, mon bijou ! À la santé des vrais protestants et de James Sullivan, notre cher trésor !

Percy gagnait du terrain, mais il n’avait qu’un bras de libre, et la foule se serrait de plus en plus autour de lui.

— Buvez, répétait-on, buvez, major Mortimer ; si vous n’êtes pas un coquin de modéré, comme on le dit… un papiste déguisé… buvez !

Percy poursuivait sa route comme il pouvait et ne buvait point. C’était merveille de voir son visage pâle et froid se dresser parmi toutes ces têtes ardemment enluminées.

Le moment vint où il fut impossible au major de faire un pas de plus. La cohue, moitié riant, moitié menaçant, lui barrait absolument le passage et portait jusqu’à sa bouche les verres remplis d’usquebaugh.

Le major s’arrêta, promena sur la foule son regard tranquille et prit un verre plein.