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LA BANDE CADET

Puis avec une soudaine violence :

— Elle ne ment jamais ! Elle dit tout ! Je ne sais pas si c’est droiture ou effronterie. Je la hais terriblement, mais je l’aime comme jamais femme ne fut aimée. Je n’aurais pas dû lui laisser mon fils… J’ai été fou, l’as-tu ouï dire ? Et si j’avais su ! Elle méprise ceux qui adorent à genoux ; j’ai été trop bon, il fallait commander : elle voulait un maître !

Les deux pièces qu’il avait préservées étaient dans la cassette. Il la referma, et répéta :

— Un maître ! Le fils de cet homme est son maître ! Elle a obéi à tous ses caprices, elle l’a empoisonné de caresses, il est devenu son tyran et son idole, alors, elle l’aime ! Elle l’aime follement… me comprends-tu ?

— Non, répliqua Morand ; mais trop parler vous épuise.

— Je te dis que j’ai été trop bon ! s’écria le duc, en proie à une extravagante colère. Du vin ! donnez-moi du vin ! je veux avoir la force d’un homme pendant une heure encore !… Et qu’elle vienne ! je serai son maître ! je la briserai, elle m’aimera !

Sa main, qui était reprise de soubresauts convulsifs, désigna impérieusement la bouteille entamée