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LA BANDE CADET

Le duc laissa échapper un gémissement. La joie douloureuse qu’il éprouva était trop forte pour lui. Il ferma ses paupières éblouies.

— Vous êtes plus belle que mes souvenirs de bonheur ! dit-il, parlant pour lui-même avec la voix de l’extase. Je me suis reproché souvent de vous avoir aimée ; qui donc aurait pu ne pas vous aimer ?…

— Mais vous avez souffert, vous aussi, Angèle ? interrompit-il en la contemplant de nouveau.

— Oui, dit-elle, je souffre, c’est vrai.

— Cela vous serait-il un soulagement si je vous pardonnais avant de mourir ?

D’un mouvement rapide comme l’éclair elle se pencha et mit un baiser sur sa main. Il en eut un choc dont la violence l’épuisa, et il pleura à son tour, balbutiant :

— Si vous aviez eu confiance en moi, comme nous aurions été heureux !

Elle se redressa, son émotion n’existait plus.

— Jamais, prononça-t-elle froidement, je ne vous ai trompé, monsieur le duc. Si j’accepte votre pardon avec reconnaissance, c’est que j’ai été votre malheur, mais cela, en dehors de ma volonté et malgré moi.