Page:Féval - La Bande Cadet, 1875, Tome I.djvu/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
LA BANDE CADET

téressées à persécuter sa jeunesse m’ont offert ma fortune pour verser trois gouttes de mort-aux-rats dans son lait, mais plutôt mourir…

Le militaire est romanesque, on ouvrait des yeux tout ronds autour de lui. Cependant le caporal demanda :

— Qu’est-ce que vous faites de votre état, vous, l’homme ? Vous avez comme ça un air qui ne me paraît pas conforme.

Échalot répondit, en remettant son paquet fermé dans sa grande poche :

— Outre l’allaitage de Saladin et l’amitié de Similor, qui est avec moi comme Oreste et Pylade, je m’adonne à l’intrigue sans jamais manquer à l’honneur !

Il avait l’air à la fois modeste et fier en prononçant ces paroles remarquables. Les hommes du poste s’entre-regardèrent et le caporal se toqua le front en disant tout bas :

— Ça me fait l’effet qu’il ne l’a pas inventée !

Les autres éclatèrent de rire. Échalot avait compris. Sa physionomie étonnée et naïve exprima la plus vive indignation. Il allait répondre du haut de sa dignité offensée, quand un bruit de roues se fit entendre au-dehors.