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LA BANDE CADET

une table, une petite commode et un fauteuil, — un vrai fauteuil, dans lequel le prisonnier entendit, en même temps que les Jaffret, les vendeurs de canards tournant l’angle de la rue Saint-Antoine.

Avez-vous remarqué que c’est là une industrie morte ? Depuis la guerre, je crois être bien sûr de n’avoir plus jamais entendu ces pauvres gens qui criaient avec un zèle de sauvage : « Voilà ce qui vient de paraître. »

Les renseignements que M. le directeur nous a donnés sur le prisonnier étaient exacts, quant à son âge et à l’infirmité qui ne lui laissait qu’un bras ; mais, dans ce signalement, un mot dépassait peut-être le but : Clément n’était pas laid, malgré l’énorme cicatrice qui brisait la régularité de ses traits, malgré les cheveux incultes et la barbe épaisse qui couvraient les trois quarts de son visage. C’était une tête énergique, toujours pensive, souvent railleuse, et que parfois le sourire éclairait de douceurs inattendues. Il n’agissait qu’avec sa main gauche, dont il faisait tout ce qu’il voulait ; son bras droit, ou du moins ce qui en restait, rentrait sous sa jaquette, dont la manche droite était vide.

De corps, il était bien fait, grand, et semblait re-