Et depuis lors, pourtant, chaque fois que venait le soir elle paraissait inquiète ; elle écoutait ; si un bruit de pas venait de l’escalier, elle attendait.
Le dernier jour de la seconde semaine, quand Médor revint de ses courses, il la trouva occupée, selon l’habitude, à faire et défaire l’arrangement de ses bien-aimées reliques.
Elle semblait plus gaie ; une nuance rose animait l’ivoire de sa joue ; en montant l’escalier, Médor l’entendit, qui chantait tout bas une petite chanson qu’elle avait apprise naguère à Justine.
C’était tout à fait la voix d’un enfant. On eût dit qu’elle essayait de se tromper elle-même et d’écouter encore une fois le chant argentin de l’absente.
Au moment où Médor entra, elle se tut et demanda :
— N’avez-vous rien appris de nouveau ?
Médor fut étonné ; il y avait plus d’une semaine qu’elle n’avait interrogé.
— Tout va bien, répondit-il, on cherche, on trouvera.
Lily lui tendit la main ; c’était la première fois. On aurait pu voir le cœur du pauvre garçon battre sous sa veste.
— Vous l’aimiez bien, dit-elle. C’est pour elle que vous avez pitié de moi.
— C’est pour elle et pour vous, reprit Médor vivement.
Mais il s’interrompit pour ajouter :
— Oui, c’est vrai, je l’aimais bien, c’est pour elle.
Ce fut tout. La Gloriette reprit son ouvrage.
Au bout de quelques instants, elle revint à Médor qui s’était assis près de la porte et qui songeait. Elle tenait à la main deux bijoux de petits souliers.
— J’ai retrouvé cela, dit-elle toute joyeuse, je les lui avais mis pour son baptême.
Et elle raconta le baptême avec cette volubilité qu’elle avait chaque fois qu’elle parlait de Petite-Reine.
— Son père était si heureux ce jour-là ! soupira-t-elle en finissant.
Elle n’avait jamais parlé du père de Petite-Reine, quoique Médor eût bien deviné que c’était l’homme qui demeurait au château de Monceaux, en Bléré, par Tours.
Il resta muet, Lily continua :
— Il est peut-être mort, puisqu’il ne me répond pas. Il avait bon cœur et il adorait l’enfant.
— Il est peut-être aussi en voyage, suggéra l’excellent Médor, qui s’étonna d’éprouver une certaine répugnance à plaider la cause du père de Petite-Reine.
— Ou bien ma lettre était mal faite, pensa tout haut la Gloriette. Je n’ai pas pu en écrire bien long, ma main tremblait trop. Je cherche à me souvenir.
Elle pressa son front entre ses doigts.
— Oui, reprit-elle, c’est cela, je lui ai dit : « Mon cher Justin, notre petite est perdue, on me l’a volée, viens à mon secours. » Est-ce assez ?
— Ah ! fit Médor, si j’avais été au bout du monde, moi, ou sur le lit de mon agonie…