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qui soulevait le sein de Francesca ; Remy tournait vers eux et à la dérobée un regard timide et déjà reconnaissant.

Le colonel rompit le premier le silence.

— Ah ! pauvre bichette, dit-il en atteignant son mouchoir pour essuyer ses yeux secs, tu n’as pas eu beaucoup de bonheur en ménage, c’est vrai. Si, aussi bien, je t’avais donné une perle comme ce cher Remy !… Mais voyons, voyons, nous n’avons pas le sens commun, mes trésors. Ce n’est pas en pleurnichant qu’on arrange les affaires. Moi, d’abord, ce mariage-là m’enchanterait : Remy et Valentine ! les deux chers enfants gagneraient tous deux, du même coup, un gros lot à la loterie de l’avenir. Quel joli couple et quelle bonne maison aussi, car ils sont riches tous les deux ; je connais, à l’égard de Valentine, les intentions de Mme d’Ornans et d’une autre personne, qu’il est inutile de nommer… Parlons peu et parlons bien : notre bon Remy s’est-il déclaré vis-à-vis de la jeune personne ?

— Oh ! fit le jeune magistrat, jamais !

— Mais regardez-le donc ! s’écria la comtesse, et ne lui faites pas semblable question ! c’est à moi qu’il adresse ses déclarations : des paroles qui brûlent et qui attendriraient une tigresse.

— C’est que, fit le colonel, ce n’est pas la même chose. A-t-il au moins quelque donnée sur l’état du cœur de notre Valentine ?

— Si j’avais eu la moindre espérance… commença Remy d’un ton désolé.

— C’est la peine du talion, interrompit Francesca ;