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Mme la marquise expliquait cela du reste fort naturellement : Valentine était la fille de sa cousine germaine, une Lamothe-d’Andaye qui avait épousé en Italie M. le comte de Villanove, dignitaire de la petite cour de Modène.

Valentine était orpheline de père et de mère.

Par un hasard heureux, ce comte de Villanove se trouvait être un assez proche parent de la famille Bozzo-Corona, et le colonel témoignait à Valentine une tendresse paternelle.

Voilà tout ce qu’on savait de son histoire ; on ne connaissait pas davantage sa position de fortune, mais les arithméticiens de salon qui vont supputant les probabilités de dot cotaient la sienne dans les plus hauts cours.

Mme la marquise, en effet, manquant d’héritiers directs, était maîtresse de sa fortune ; elle traitait Valentine comme une fille chérie, et d’un autre côté, il était facile de voir que ce noble Crésus, le colonel Bozzo, comptait, en cas de mariage, dorer abondamment la corbeille.

Rien ne pressait, Valentine n’avait pas dix-huit ans, et pourtant le nuage des prétendants commençait à se détacher de l’horizon.

Il y avait de tout dans ce nuage qui couvrait déjà la moitié du ciel : il y avait d’abord ce qu’on appelle des « partis » au faubourg Saint-Germain, un bataillon de ces braves petits gentilshommes que leurs mamans poussent et casent, le mariage étant une chose de règle comme la vaccine et la conscription ; il y avait ensuite de purs calculateurs, de jeunes di-