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bien un jour voir assis sur le trône de France, mais cela sans verser préalablement des flots de sang, et grâce au seul travail de la Providence qui, tôt ou tard, dessille les yeux des peuples aveugles.

Pour aider tout doucement la Providence et favoriser la restauration de son prince, Mme la marquise d’Ornans donnait en son hôtel des Champs-Élysées de fort jolies fêtes où elle recevait le meilleur monde.

Nous ne saurions trop répéter que ses salons n’avaient aucune couleur politique ; on y trouvait réunis des partisans du gouvernement et des orateurs de l’opposition, quelques écrivains, quelques membres du clergé, beaucoup de jolies femmes et bon nombre d’hommes à la mode, parmi lesquels nous devons citer un jeune magistrat de haut avenir, honoré de l’amitié du garde des sceaux et qui, certes, se fût éloigné de tout conciliabule suspect : le juge d’instruction Remy d’Arx.

Remy d’Arx, malgré ses travaux sérieux, et les avances qui l’appelaient vers le monde officiel, était un fidèle habitué de l’hôtel d’Ornans. La marquise et son cercle intime l’accueillaient avec le plus vif empressement.

Il était surtout le favori d’un homme vénérable qui trônait dans toute la force du terme, à l’hôtel d’Ornans, et qui partageait avec « le prince » les respects religieux de la marquise. C’était un vieillard de très grand âge, fort riche et de bonne maison, qui s’était fait de la bienfaisance une occupation, on pourrait presque dire une carrière. Il avait