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une gentille somme pour avoir Mlle Fleurette, mais une fois partie, ni vu ni connu, tout s’était fait dans le plus grand mystère.

Un beau matin, à la foire de Saint-Cloud, Mme Samayoux, après avoir pris sa chopine de blanc, allait porter le déjeuner à ses bêtes, lorsqu’elle vit entrer dans la baraque une brassée de taffetas, de jais, de fleurs et de dentelles : c’était Fleurette qui se jeta à son cou en lui disant : « Où est-il ? j’en mourrai si vous ne voulez pas m’apprendre où il est ! »

— Je vous dis qu’il en a ! s’écria l’Amitié, qui claqua ses mains l’une contre l’autre, il en a tout un rouleau !

Piquepuce, interloqué, le regarda avec étonnement, mais Cocotte expliqua :

— Le patron entend de la corde de pendu… va toujours.

— Ça lui importe donc, au vieux dont vous avez fait mention, poursuivit Piquepuce, que Mlle Fleurette et le jeune M. Maurice s’entr’adorent ? Alors tout va pour lui comme sur des roulettes, car la petite demoiselle est revenue plus de dix fois, au risque de se compromettre et rien que pour parler de lui. Il n’y a pas comme les dompteuses pour avoir de la sensibilité ; ça fendait l’âme de maman Samayoux de voir l’inclination mutuelle des deux jeunes gens, mais elle s’intéressait à leurs amours comme si c’était une pièce de la Gaîté, et elle a même fait là-dessus une romance qu’elle voulait me chanter à toute force.

C’est elle qui a écrit au jeune homme en Afrique