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L’endroit que ce bon M. l’Amitié appelait son confessionnal était tout bonnement un cabinet particulier, situé au premier étage. L’unique fenêtre de ce réduit, destiné à fêter l’amour en guenilles et Bacchus frelaté, donnait en face de la ruelle et avait vue sur le boulevard. Une double porte toute neuve et bien rembourrée faisait contraste avec l’indigence malpropre de l’ameublement. Ce luxe était dû à Toulonnais-l’Amitié, qui avait fait de ce lieu une succursale de ses divers cabinets d’affaires.

Car c’était un homme considérablement occupé.

Au moment où Cocotte passait le seuil, une voix cria du bas de l’escalier :

— Ne fermez pas, j’arrive à l’ordre !

L’instant d’après, Toulonnais était assis sur le vieux divan entre ses deux acolytes.

Mons Piquepuce avait une dizaine d’années de plus que le joli Cocotte, dont il était l’inséparable : Virgile, avant nous, avait mis cette différence d’âges entre Nisus et Euryale. L’apparence de mons Piquepuce était celle d’un rat de chicane prétentieux et romantique ; il portait de longs cheveux cachant le col d’un habit pelé.

— Cause, lui dit l’Amitié, le petit n’est pas de trop ; il est bon qu’il sache un bout de l’histoire.

— Eh bien ! commença Piquepuce d’un air important, notre jeune homme est à Paris.

— Parbleu ! fit Toulonnais, qui haussa les épaules. Si tu veux, je vas te donner son adresse.

— Si vous en savez plus long que moi… voulut dire Piquepuce.