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je voudrais encore les sauver, mais ils appartiennent à la loi. Messieurs, elle était ma seconde fille. Laissez-moi me retirer avant d’accomplir votre devoir.


Ils étaient trois dans la voiture qui reconduisait le colonel Bozzo à son hôtel de la rue Thérèse.

Lecoq et Samuel pouvaient passer pour des scélérats endurcis, et pourtant ils regardaient avec une superstitieuse terreur ce vieillard souffreteux et frissonnant dans sa douillette.

— Depuis soixante-dix ans, dit le colonel, il en a été ainsi de tous ceux qui se sont attaqués à moi. Vous êtes sauvés, mes bijoux ; tressez-moi des couronnes, s’il vous plaît !

— Mais, objecta Lecoq, ils ne sont pas encore condamnés. Ils parleront.…

— Savoir ! ils ont un tendre ami que je connais bien et qui leur fera parvenir le nécessaire pour éviter la honte de l’échafaud.

Un rire sec le prit, qui n’eut point d’écho.

À ce rire une petite quinte de toux succéda.

Le colonel porta son mouchoir à ses lèvres et le mit ensuite auprès de lui.

Quand il fut descendu de voiture, Lecoq et Samuel se regardèrent.

— Est-ce le diable ? dit Lecoq.

Samuel prit le mouchoir oublié sur le coussin.

— Le diable ne meurt pas, répondit-il.

Et il montra une tache rougeâtre qui restait à l’en-