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Quelques habitués de l’hôtel s’étaient rapprochés d’eux et un groupe intime se formait.

— Est-ce que cela est bien vrai ? demanda un des joueurs de whist de la marquise, est-ce que l’ordonnance de non-lieu est rendue ?

— Si bel et si bien, répondit M. de Champion, qu’à l’heure présente le lieutenant Pagès se promène en toute liberté dans Paris.

— C’est impossible ! fit-on à la ronde.

Mme de Tresme appela du doigt monsieur Ernest et ajouta en manière d’explication :

— Ce petit bonhomme a un frère au parquet, et nous allons avoir des détails.

Elle s’interrompit pour crier à sa fille, qui s’approchait curieusement avec quelques compagnes :

— Regardez, mesdemoiselles, admirez, c’est de votre âge, nous n’avons pas besoin de vous.

Aussitôt interrogé, M. Ernest prit la pose d’un homme d’importance.

— Vous ne pouviez pas mieux vous adresser, dit-il ; c’est mon frère, le substitut, qui a occupé dans cette affaire-là. Une affaire tout bonnement incroyable ! M. Remy d’Arx est un homme d’un immense talent…

— Je crois bien ! fit le chœur.

— Mais, reprit M. Ernest, personne n’est à l’abri d’avoir un accident, une maladie, un coup de marteau… Enfin moi je ne sais pas ce qu’a eu M. d’Arx, mais il a eu quelque chose.

Le chœur demeura muet.

— Voici l’histoire, poursuivit le petit jeune homme,