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— Et pourtant, mon Dieu, mon Dieu ! dit-il en se laissant tomber sur son siège, il est innocent, je le sais, et sa vie est entre mes mains parce que je suis seul à le savoir. Je cherche en vain à me tromper moi-même ; je donnerais ma fortune, je donnerais tout mon sang pour trouver en moi un doute, il n’y en a pas ! Et Valentine l’aime ! Et plutôt que de renoncer à Valentine, je mettrais sous mes pieds ma conscience et mon honneur !

Ces derniers mots s’échappèrent de sa poitrine comme un râle et sa tête, où les cheveux se dressaient, s’affaissa lourdement.

Il resta ainsi longtemps, le front contre ses bras croisés sur la table et pareil à un homme que l’ivresse aurait vaincu.

Parfois, tout son corps frissonnait, secoué par un tressaillement douloureux ; parfois aussi le nom de Valentine s’exhalait de ses lèvres.

Un bruit se fit à la porte du corridor, il ne l’entendit pas ; une main froide toucha la sienne, il crut rêver et ne bougea pas.

Mais une voix douce et grave dit auprès de lui :

— C’est moi, monsieur d’Arx, je vous avais promis de venir.

Il releva les yeux et se prit à trembler.

Mlle de Villanove était devant lui.

— On dirait que je vous fais peur ? murmura-t-elle avec un triste sourire.

Et en effet le regard de Remy exprimait un étrange épouvante. Son premier mot trahit sa pensée.