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avez joué follement votre vie pour gagner l’épaulette, et vous ne souhaitiez l’épaulette que pour avoir le droit de donner votre démission. Vous êtes revenu ; celle que vous aimez est noble et riche, je n’ai pas besoin de savoir quelle était votre espérance : vous êtes aimé, cela suffit pour justifier votre retour. Mon opinion est fixée. Je vais rappeler mon greffier pour que mes demandes et vos réponses soient consignées selon le vœu de la loi, c’est désormais une simple formalité. Vous êtes innocent, lieutenant Pagès, j’en ai la certitude absolue, et vous n’avez plus rien à craindre.

Maurice voulut remercier, mais le juge lui imposa silence en montrant la porte qui s’ouvrait.

M. Préault reprit sa place à la petite table ; il était manifestement de très mauvaise humeur.

L’interrogatoire de Maurice ne contenait rien qui ne soit déjà connu de nous, M. Préault, qui était un vieux rat de Palais, ne cacha point, en transcrivant les réponses de Maurice, la complète incrédulité qu’elles faisaient naître en lui.

Quand le jeune lieutenant parla de l’effraction pratiquée à l’avance, du monseigneur et de la pince introduits chez lui à son insu, le greffier ne put réprimer un petit accès de ricanement.

Maurice poursuivit :

— Ce fut justement la réunion de toutes ces circonstances qui me donna ou plutôt qui m’imposa la pensée de fuir. Je sentais le piège tendu, je voyais la trappe qui allait retomber sur ma tête ; les paroles que j’entendais au-dehors étaient accablantes, elles