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et de physionomie ; tous étaient attentifs et Corona lui-même écoutait avec une visible anxiété.

— Lecoq est percé à jour, dit la comtesse ; évidemment ce Remy d’Arx n’a plus qu’à étendre la main pour le saisir.

— Eh bien, chérie, répliqua le vieillard, ta notice est encore plus complète que celle de ce bon l’Amitié ; c’est une véritable photographie. L’abbé est peint en pied, un gendarme le reconnaîtrait ; le portrait de Corona est parlant, et quant à l’excellent Samuel, je lui conseille de se faire remplacer par un confrère si jamais Remy d’Arx le demande, car on l’a fait en vérité ressemblant comme les poires qui sont sur les murailles avec les favoris et le toupet de Louis-Philippe ! mais le chef-d’œuvre c’est notre éminent professeur en droit, celui qui nous taille des outils dans les cinq codes, celui qui, pour la première fois, nous a dit : « Il faut savoir jouer de la loi comme Paganini joue du violon ; quand on connaît la manière de s’en servir, la loi est un instrument qui vole et qui assassine. »

— Et moi ? fit le prince, dont la voix tremblait. Mon coquin de rôle est un écriteau que j’ai au dos : je suis le plus facile de tous à reconnaître.

— Aussi, répliqua le colonel, quand Remy d’Arx a eu la bonne idée de me confier son manuscrit, c’est à ton article que j’ai couru le premier. Tu as du bonheur, mon fils, et nous de même ; car, depuis deux mois, tous les soirs, notre beau juge d’instruction nous a vus ensemble à l’hôtel d’Ornans. Le moindre soupçon jeté sur toi lui donnait la clef de