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eux les moyens matériels ne peuvent rien, il faut dégainer l’arme invisible qui passe à travers les mailles du plus dur acier. Les eaux du Styx elles-mêmes ne détournent pas ses atteintes, et Mithridate chercherait en vain un antidote au poison diabolique qui l’a trempée.

« Celle-là c’est la parole, ou la pensée plus subtile encore, le soupçon, l’envie, l’ambition, la terreur, l’amour, que sais-je ? Ceux qui manient cette arme terrible et inévitable sont nombreux, ils ont de l’or, et le monde aveuglé se fait leur complice…

« … Ils ont l’ancienne organisation des Camorre qui rappelaient elles-mêmes les Saintes Vehme et les associations secrètes de la Lombardie. Le grand maître ou Père est entouré d’un Sénat dont les membres s’appellent Maîtres ou frères de la Merci. Au-dessous de cet état-major, vient un corps d’officiers admis dans une certaine mesure à l’initiation : ce sont des voleurs actifs et intelligents qu’on peut appeler au conseil quand les circonstances l’exigent.

« Les maîtres portent alors le voile noir ; excepté le Père et les membres du conseil, nul ne voit jamais leur visage.

« Au-dessous encore, il y a les soldats ou « simples, » qui obéissent comme des machines, reçoivent le prix de leur sinistre ouvrage et ne connaissent aucun secret.

« La loge centrale est à Paris ; elle peut se déplacer ; elle était à Londres lors de la tentative hardie qui faillit ruiner les réserves de la Banque d’Angleterre.