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ce dernier épisode d’une lugubre histoire, parce que le fait vous est connu ; il émut douloureusement la magistrature entière, et bien des gens prétendent que ce grand malheur est pour beaucoup dans la bienveillance que me témoigne le pouvoir.

« Un pauvre homme, un ancien serviteur de notre famille, fut accusé, jugé, condamné et porta sa tête sur l’échafaud. J’affirme sur l’honneur que ce pauvre homme était innocent… »

— Ah çà ! s’écria rudement Corona, est-ce pour entendre cette histoire, vieille comme le déluge, qu’on nous a fait venir ici ?

— Le fait est, ajouta la comtesse de Clare, que cela ne nous regarde en rien.

Les autres semblaient partager cet avis. La lecture de ce rapport annoncé comme si terrible laissait l’auditoire indifférent et presque somnolent.

Le colonel promena à la ronde son regard félin où brillait une petite pointe de causticité.

— Patience donc ! mes chers amours, dit-il ; l’aventure en elle-même vous est étrangère, car il ne reste plus personne de ce temps-là, sauf l’Amitié, qui était mon petit domestique et qui a bien grandi depuis. Tout passe excepté moi, et comme j’en ai usé de ces bons amis ! Patience ! l’auteur du présent rapport a du sang corse dans les veines par sa mère, qui était une Adriani. Ceci est tout uniment une bonne petite vendetta. Moi, je ne le trouve pas trop mal stylé le rapport ; un peu sec peut-être, mais il fallait de la place pour ce qui va suivre. J’espère que cela aura le don de vous plaire davantage. Nous