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des témoins. Mais vos amis sont riches, ma belle petite, et avec de l’argent on étouffe bien des cancans.

— Je n’ai rien à cacher ! s’écria Mlle de Villanove, qui montra son visage fier et presque provoquant.

— Certes, certes, on dit ces choses-là dans le premier moment, mais en fin de compte…

Valentine l’interrompit et demanda :

— Monsieur, êtes-vous chargé de m’interroger ? ce ne sera pas long : je l’aime et je l’aimerai toujours.

— Pour ce qui me regarde, répliqua le colonel très doucement, il ne me déplaît pas de vous entendre parler ainsi ; c’est du cœur, de la générosité ; je ne déteste pas ces défauts-là. Mais, voyez-vous bonne petite, le cœur, la générosité, la folie même, ne servent à rien quand il s’agit d’un homme placé dans la position de ce pauvre diable.

— Il est innocent ! s’écria impétueusement Valentine.

— Pourquoi vous fâcher, mon ange ? répartit le colonel ; moi je ne demande pas mieux qu’il soit innocent, c’est un joli jeune homme, mais voilà ! les apparences lui tournent diantrement le dos : un gaillard, pauvre comme Job, car on n’a pas trouvé tout à fait la monnaie d’un louis dans sa poche, amoureux d’une jeune personne qui passe à tort ou à raison pour être millionnaire, un homme assassiné, non pas le premier venu, mais un receleur ou un voleur qui avait en sa possession les diamants de la fameuse Carlotta Bernetti : joli coup de filet ! je ne sais plus combien de centaines de mille francs ! Flagrant délit