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cœur des jeunes filles est sujet à se tromper, interrogez le vôtre avec soin, écoutez bien ce qu’il vous répondra. Madame la marquise a pour vous la tendresse d’une mère, moi je ne vous dis même pas comme je vous aime. Si le jeune homme à qui vous écriviez tout à l’heure… ne frémis pas, va, petite, il n’y a pas de sorcellerie dans mon fait… si le jeune homme à qui tu as gardé ton petit cœur est digne de toi, compte sur moi. M’entends-tu bien ? Je suis avant tout du parti de ton bonheur.

Il pressa la main de Valentine qui restait froide entre les siennes et l’attira jusque sur son cœur.

— Voilà ce qu’on te voulait, ajouta-t-il dans un baiser ; on voulait te dire que tu n’as rien à craindre, que tes désirs sont des lois et qu’on se charge d’amener la marquise à trouver bon, convenable, parfait, tout ce que tu auras résolu dans ta sagesse. Et là-dessus, mademoiselle de Villanove, reprit-il en quittant son siège, on vous souhaite la bonne nuit en vous demandant bien pardon de vous avoir dérangée.

Le sein de Valentine battait violemment ; deux larmes jaillirent de ses yeux ; elle se jeta au cou du vieillard, entraînée par un irrésistible élan.

Le colonel, malgré toute sa prudence diplomatique, ne put défendre à son regard d’exprimer un espoir.

Mais l’espoir fut déçu ; Valentine ne parla point ou plutôt elle ne dit que ces seuls mots, prononcés avec une inexplicable froideur :

— Bon ami, je vous remercie.