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désemparée et disloquée, laissant la porte ouverte à demi.

En foire, on connaît beaucoup de choses, et Maurice avait été pendant deux ans de la foire.

L’objet contre lequel son pied venait de heurter était une pince en acier.

Maurice pouvait donner un nom technique à la tige de fer engagée dans la serrure : c’était ce que les voleurs nomment un « monseigneur. »

Une idée rapide comme l’éclair lui traversa le cerveau ; il se demanda :

— Est-ce que tous ces préparatifs étaient pour moi, et l’assassin s’est-il trompé de victime ?

Car sans avoir vu encore l’intérieur de la chambre voisine, il savait être à deux pas d’un homme assassiné.

Ce n’était pas l’heure des réflexions ; il poussa la porte et se trouva en présence du malheureux Hans Spiegel, le juif allemand qui était venu, la veille au soir, dans l’arrière-boutique de la rue Dupuis, proposer au faux revendeur Kœnig les diamants de Carlotta Bernetti, cachés dans une canne à pomme d’ivoire.

Hans Spiegel avait encore à la main un pistolet à deux coups tout armé.

Une trace bleuâtre qu’il portait autour du poignet disait pourquoi il n’avait pas pu s’en servir. Il était couché de tout son long, la nuque sur le carreau, les deux bras étendus ; il avait au nœud de la gorge une effrayante blessure, large de quatre doigts, et qui avait rendu déjà une mare de sang.