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Ah ! puissent mes bêtes féroces un jour me dévorer
Plutôt que de continuer dans un pareil supplice !
On ne souffre pas longtemps à être mangé,
Et c’est pour toujours que mon bourreau est Maurice !

— Bravo ! bravo ! bravo ! fit de nouveau le jeune officier, mais c’est assez pour une fois, maman : encore une tranche.

— Je voudrais être à la place du fricandeau, puisqu’il a su te plaire, murmura Léocadie en mettant la main au plat, mais je ne veux pas me rendre à charge par mes plaintes mélancoliques. Assez de guitare, quoiqu’il y ait encore dix-neuf couplets, tous aussi soignés les uns que les autres. Je te disais donc, bibi, que dans les premiers temps je ne te reconnaissais pas sur les journaux à cause que tu nous avais dissimulé le nom de ta famille, mais tous ceux qui s’appellent Maurice me tirent l’œil ; quand je lus dans le Journal du Commerce la première diablerie du spahi Maurice Pagès, ça m’émoustilla ; quelques semaines après, nouveau tour de force ; le caporal Maurice Pagès avait ramené à lui tout seul un demi-quarteron de Béni Zoug-Zoug ; après ça fut une équipée du brigadier Maurice Pagès ! et des gibelottes d’Arabes, et des mirotons de Kabyles, tous fricassés par le même Maurice Pagès ! ça m’agaçait, à la fin, mazette ! je me disais : Si seulement mon petit agneau de Maurice… Jusqu’au moment où je reçus ta première lettre signée Maurice Pagès, bri-