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coupés ras ; son nez aquilin taillé selon de vives et tranchantes arêtes relevait ses narines à la moindre émotion ; sa bouche était ferme, nette, singulièrement douce dans le sourire, mais sévère aussi à l’occasion, et en quelque sorte rembrunie par la courbe énergique de son menton.

Ses yeux noirs brillaient et brûlaient, protégés par des cils soyeux comme ceux d’une femme, et c’est à peine si le duvet de sa moustache naissante ombrageait suffisamment sa lèvre supérieure.

Il était grand, avec cela ; gracieux dans sa taille souple et bien prise, dont les moindres mouvements annonçaient une remarquable agilité.

— Je vous préviens, maman Léo, dit-il en rendant de bon cœur l’accolade de la dompteuse, que si vous me serrez comme cela, je reprends ma démission pour retourner en Afrique. Heureusement que les Arabes n’ont pas le poignet si bien attaché que vous, sans quoi je n’aurais pas le plaisir de vous revoir.

— Car tu les as frottés de près, n’est-ce pas, mon Maurice ? s’écria la bonne femme, dont la voix était douce comme un solo de clarinette ; j’ai lu tout ça sur les journaux. Et figure-toi, je ne te reconnaissais pas dans les premiers temps : tu nous avais caché ton nom, méchant que tu es !

— Dame ! fit Maurice, pour entrer dans la cage du tigre et gigoter sur le trapèze américain…

— Ah oui ! tu méprises bien l’état maintenant !

— Pas trop, puisque me voici chez vous, ma grosse maman.