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Elle lâcha son bras pour appuyer ses deux mains contre sa poitrine.

— Je ne vous connais pas, moi ! murmura-t-elle avec une sorte d’égarement : Êtes-vous fort ? Êtes-vous brave ?

— Nita ! fit le jeune homme qui la soutint, car elle défaillait. Quelque chose en vous est changé depuis tantôt…

— Tout est changé ! prononça-t-elle d’une voix morne. Nous n’avons pas parlé de choses sérieuses, là-bas…

Elle montrait les fenêtres éclairées du billard.

— Nous avons parlé de notre amour, dit Roland avec reproche.

— Et il me semble que je vous aime à chaque instant davantage… mais nous étions fous, Roland ! Dites-moi que vous êtes fort ! dites-moi que vous êtes brave ! dites-moi que vous allez me défendre et me protéger !

Elle croisa ses deux mains sur l’épaule de Roland qui entourait de son bras sa taille flexible et frémissante.

— Au nom de Dieu, Nita, dit le jeune homme qui sentait les spasmes de sa poitrine, qu’avez-vous ? parlez ! Contre qui faut-il vous protéger et vous défendre ?

— Contre la comtesse, répondit Marguerite, étudiant mieux les inflexions de sa voix, depuis qu’on lui avait parlé d’un changement survenu en elle, contre M. Léon de Malevoy…

— Celui-là ! s’écria Roland avec une soudaine colère : je vous l’avais bien dit ! quelque chose m’avertissait…

S’il eût fait jour, Marguerite n’aurait pu cacher l’éclair qui brilla dans ses yeux.