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Malevoy, on m’a dit que vous m’aimiez. Si vous m’aimez, je puis encore être sauvée.

Ce fut une joie trop violente ; Léon chancela et ses yeux se voilèrent.

Elle attendait et ne parlait plus ; seulement, on voyait, sous la gaze, les spasmodiques battements de son sein.

Léon se laissa glisser à deux genoux.

— Il faut me pardonner, balbutia-t-il. Je ne crois pas à ce que j’entends. Je cherche à m’éveiller d’un rêve qui, en s’évanouissant, va me laisser tout au fond de ma misère…

— Je n’ai pas beaucoup de force, Monsieur de Malevoy, fit-elle d’une voix qui allait s’altérant, comme si sa vigueur physique n’eût point été à la hauteur de sa vaillance morale. Notre temps est bien précieux désormais. Répondez, oui ou non : m’aimez-vous ?

— Si je vous aime, Nita ! s’écria Léon dans un élan de passion qui fit jaillir les larmes de ses yeux. Il y a une chose qui m’est bien chère, plus chère mille fois que ma vie, c’est l’honneur de mon nom, seul héritage que je puisse laisser à ma sœur. Nita, Nita ! depuis une semaine, je joue mon honneur contre je ne sais quelle chance impossible qu’on jette à ma folie comme un appât. Je suis payé pour ne pas avoir confiance en Mme la comtesse du Bréhut, et cependant, sur un simple mot d’elle…

— Vous avez raison, l’interrompit Marguerite, de ne pas avoir confiance en Mme la comtesse du Bréhut. Relevez-vous et donnez-moi votre main.

Léon obéit. Il sentit que la main de sa compagne était glacée, mais ferme.

— Vous avez raison de m’aimer, reprit-elle encore. Je vous en remercie. J’accepte cet amour, entendez-vous bien, Monsieur Léon de Malevoy, librement et avec reconnaissance. Même en ce moment où j’ai tant besoin d’aide, je ne saurais pas mentir. J’ai eu pour un autre que vous un sentiment tendre, une sympathie qui était peut-être de l’amour…

Elle s’arrêta, pensive. Léon dit :

— Ma sœur a prononcé un nom devant