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mais Nita dit : Merci.

Roland s’éloigna aussitôt : elles demeurèrent seules et n’échangèrent plus une parole.

Le bouquet fut déposé sur la tombe, fidèlement, sauf une clochette qui tomba d’une campanule azurée, et que Rose vola.

On éveilla la religieuse, et l’on partit.

Ce fut tout. Est-il, cependant, besoin d’autre chose ?

Rose rit beaucoup à la fête de famille. Elle s’étonnait de sa gaîté. En revenant elle pleura et s’irrita contre ces larmes sans motif.

Nita, au contraire, resta triste tout le jour et souffrit de sa solitude.

Elles parlèrent souvent du beau jeune homme : Rose, froidement ; Nita, avec moins de réserve. Nita gardait cette vague pensée de l’avoir rencontré quelque part, autrefois.

Rose avait un médaillon qui contenait quelques reliques chéries. La clochette bleue s’y dessécha.

Pendant le séjour de la princesse au couvent, elle obtint quatre fois la permission d’aller voir son père. Chaque fois Rose l’accompagna. Le jardin qui était autour de la petite tombe restait frais, grâce à des soins évidemment journaliers, mais elles n’y virent plus jamais le beau jeune homme.

Son offrande lui fut rendue, cependant, au centuple. Par trois fois, chacune des deux jeunes filles déposa un bouquet sur la table de marbre blanc.

Un soir de la semaine pascale, six mois après avoir quitté le couvent, Mlle de Malevoy, pieuse et cherchant dans ses pratiques de dévotion un remède contre je ne sais quel mal, dont personne n’avait le secret, se trouva tout à coup face à face avec Roland, au sortir du Salut de Saint-Sulpice.

Il était debout près du bénitier. Rose resta interdite, oubliant de faire le signe de la croix. Elle attendait, en vérité, une parole, comme s’il n’eût pas été un étran-